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vendredi 20 novembre 2015 20:27
Au pays des tulipes, le symbole de la plante nationale est décliné à toutes les sauces : rouge pour l’amour éternel, panachée pour l’admiration, jaune pour l’amour sans espoir. Le noir, Alexandre Dumas en a fait un roman, et Ruud Gullit son surnom, pour la postérité.
De Haarlem à Grozny, en passant par Milan, Londres et Los Angeles, le champion d’Europe 1988 et double lauréat de la Coupe d’Europe des Clubs Champions avec le mythique AC Milan d’Arrigo Sacchi a déjà sacrément rempli sa biographie. Joueur aussi doué que titré, entraineur pionnier et instinctif, animateur et consultant sur le tube cathodique, chanteur de reggae pour la bonne cause, président de candidature pour une Coupe du Monde de la FIFA, Gullit touche à tout, et bien. "J’aime entreprendre, découvrir et surtout prendre du plaisir", se définit-il.
Mais c’est bien balle au pied que Ruud l’épicurien a laissé une empreinte indélébile. Ses dreadlocks remuées dans le vent de Munich un soir de finale de Championnat d’Europe des Nations ont fait sa légende. Celle d’un artiste imprévisible mais fiable. La Tulipe Noire ne s’est jamais fanée.
Libéro devenu buteur
La genèse a pour théâtre Haarlem. C’est là que le prodige de Jordaan, le quartier d'Amsterdam où il découvre le ballon rond, signe son premier contrat professionnel. Il a 16 ans et côtoie les frères Koeman en sélection de jeunes. Construite au Door Wilskracht Sterk, la réputation du plus jeune joueur de l’histoire de l’élite néerlandaise se consolide en trois saisons d’Eredivisie. Malgré son positionnement comme libéro, il marque quasiment une fois tous les trois matches. Le Feyenoord Rotterdam de l’icône Johan Cruyff réussit un pari génial : le recruter puis le repositionner en milieu offensif.
Avec 40 buts en 101 rencontres et un doublé Coupe-Championnat en 1984, le phénomène est élu meilleur footballeur néerlandais l’année de ses premiers sacres. En quête de progression permanente et de challenges, il file chez le rival du PSV Eindhoven l’année suivante. En deux saisons au Philips Stadion, la Tulipe Noire éclot complètement sur la scène internationale.
Deux titres en Eredivisie, 54 buts en 75 rencontres, un nouveau trophée de meilleur footballeur de l’année et surtout un Ballon d’Or en 1987 : Gullit et le PSV vivent une histoire d’amour et d’honneurs, glanés en deux saisons seulement. Avec ses tresses, son physique athlétique, sa taille, rare pour un meneur (1m86), son sourire hollywoodien et sa décontraction naturelle, le fils de George, professeur d’économie, glane une aura mondiale et un transfert chez les géants italiens de l’AC Milan.
Son personnage est aussi vendeur que son jeu. La légende s’assoit définitivement au panthéon du football mondial un soir de juin 1988. En finale de l’UEFA EURO 1988, son coup de tête à la 33ème minute place les Pays-Bas de Rinus Michels sur la voie royale de leur premier trophée international. Mais Gullit, capitaine des lauréats Oranjes, n’est pas encore au sommet de son art.
L’empire milanais
Dans la foulée du triomphe en Allemagne, ses deux saisons suivantes en Lombardie seront de la même cuvée. Le triumvirat formé avec Frank Rijkaard, ami des années d’adolescence dans les rues d’Amsterdam, et Marco van Basten domine l’Italie et l’Europe. Le maître Sacchi invente un nouveau football, dans l’esprit de l’Ajax des années 1970. Personne ne résiste aux Rossoneri. Le Real Madrid en prend cinq dans la musette à San Siro en demi-finale de la Coupe d’Europe des Clubs Champions en 1989. Le Steaua Bucarest un de moins seulement en finale, sur la pelouse du Camp Nou de Barcelone. Gullit en met deux à lui tout seul.
L’année suivante, rebelote, cette fois aux forceps, face au Bayern Munich en demi-finale et Benfica en finale (1:0, but de Rijkaard). Epuisé par une longue saison, Gullit passe à côté de sa Coupe du Monde de la FIFA, Italie 1990. L’élimination de la Coupe d’Europe face à l’OM au Stade Vélodrome en 1991 marque le début du déclin de l’empire Sacchi. Et celui des pépins physiques pour son maestro, marqué par l’échec à l’EURO 1992 et une élimination aux tirs au but en demi-finale face au Danemark.
Une page se ferme, une autre s’ouvre
Une nouvelle ère se prépare à Milanello et Gullit est progressivement mis à l’écart. Mais la Tulipe ne se flétrit pas. Requinquée à la Sampdoria de Gênes, elle convainc l’horticulteur Silvio Berlusconi de la rapatrier à Milan. Pour quelques semaines seulement…
L’idylle est terminée. Retour à la Sampdoria pour un Gullit auteur de neuf buts. En fin de contrat, après huit ans en Serie A, le trentenaire surprend en répondant à l’appel du crampon de Chelsea, alors modeste club de milieu de tableau en Premier League. Un an plus tôt, à la veille de la Coupe du Monde de la FIFA, Etats-Unis 1994, il avait claqué la porte de l’équipe nationale, fâché avec Dick Advocaat, nouveau maître du banc oranje.
Le départ de Glen Hoddle pour les commandes de l’équipe nationale permet à Gullit de cumuler les deux fonctions de joueur et entraîneur. C’est avec cette double casquette que le néo-Londonien remporte la FA Cup en 1997 avec les Blues. Limogé par Chelsea, alors pourtant classé quatrième en championnat, Gullit rebondit à Newcastle, pour une saison seulement. Il a raccroché les crampons à 35 ans, après son départ des Blues. Remercié en août 1999 par les Magpies, il se dit désenchanté et déçu par le football. Il assure même alors qu’il n’entraînera plus jamais...
Feyenoord le fera changer d’avis en 2004. La flamme revient. Une saison au Los Angeles Galaxy (2007-08) l’entretient. Nommé président de la candidature belgo-néerlandaise pour la Coupe du Monde de la FIFA 2018, Gullit écrit une nouvelle page de se vie en or en signant début 2011 pour entraîner le Terek Grozny, en Tchétchénie. Une surprise de plus…
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