Auteur :
mercredi 20 juillet 2016 22:59
Il alliait discrétion, vaillance, réussite et, surtout, bonne éducation. Aujourd’hui, Emilio Butragueño fait valoir ces qualités en tant que Directeur des Relations Institutionnelles du Real Madrid. Mais le football a beaucoup changé et son style extrêmement réservé ne ferait peut-être pas recette auprès des jeunes d’aujourd’hui.
Butragueño se forme au poste d’attaquant dans les petites catégories du Real Madrid, dont il intègre l’équipe première en 1984. Surnommé le Buitre (le vautour), il est le leader d’un quintet de joueurs issus du centre de formation - Rafael Martín Vázquez, Míchel, Pardeza et Sanchís sont ses quatre associés - qui va offrir au club merengue l’une de ses plus belles périodes. Avec le Real, Emilio remporte six Ligas, deux Coupes du Roi, deux Supercoupes d’Espagne, deux Coupes de l’UEFA et une Coupe de la Ligue. Meilleur buteur du championnat lors de la saison 1990/1991, il n’aura cependant pas le bonheur de remporter la prestigieuse Coupe d’Europe des Clubs Champions.
Souvenirs, souvenirs
Après 11 ans de bons et loyaux services, il quitte la Casa Blanca pour vivre la dernière ligne droite de sa carrière au Mexique, à l'Atlético Celaya, où il raccroche définitivement les crampons en 1998. Diplômé en gestion de l’entreprise, il obtient ensuite un master de gestion de club de sport aux États-Unis, formation qui lui permet d’occuper le poste de Directeur sportif du Real Madrid au cours du premier mandat de Florentino Pérez à la présidence. Aujourd’hui, il a retrouvé un bureau dans les coulisses du club. "Mon travail est très varié. Ma femme me disait toujours qu'à la fin de ma carrière, je devrais consacrer davantage de temps à ma famille mais en fait, j'en ai beaucoup moins qu'avant", confie-t-il à FIFA.com avec une pointe de regret.
En dehors de son palmarès impressionnant en club, Butragueño a écrit sa propre légende sous le maillot rouge de la sélection, avec lequel il a disputé 69 matches et inscrit 26 buts. "J'ai fait mes débuts avec l'Espagne contre le Pays de Galles. Nous avions gagné 3:0 et j'avais marqué. C'était quasiment à la dernière minute, sur une contre-attaque. Gordillo m'avait fait la passe", se souvient-il comme si ce match de 1984 remontait à hier. "Faire ses débuts en équipe nationale, c'est magique. Il n'existe pas plus grand honneur pour un joueur de football que de représenter son pays. Si on a la chance d'aller à la Coupe du Monde, alors c'est le top."
Réputé pour son dribble imprévisible et son instinct de tueur dans la surface, cet attaquant a eu la chance de disputer deux épreuves suprêmes. Lors de la première, Mexique 1986, il a atteint le statut de légende. "En termes de popularité, ça a été le summum pour moi. En huitième, nous sommes tombés contre le Danemark, qui était l'une des meilleures équipes du moment, l'un des favoris. Les Danois ont dominé la première période, mais nous avons exploité une erreur de leur part pour égaliser. Ensuite, ils ont pris l'initiative et nous en avons profité en contre. J'ai marqué quatre buts… Ça n'arrive pas tous les jours", raconte-t-il, encore soufflé par son exploit. "Marquer quatre buts dans une Coupe du Monde, c'est quelque chose que je n'avais même pas imaginé. La réalité a été plus généreuse que mes rêves de gosse", reconnaît l'ancien goleador.
"Je me suis senti un peu bizarre. Je n'étais pas un grand buteur, mais ce jour-là, j'ai eu de la réussite et j'ai obtenu deux penalties. J'ai pris cela comme ça venait. À la fin, j'ai échangé mon maillot avec Michael Laudrup. Je l'ai toujours à la maison. Mon père, qui était dans les tribunes avec mon épouse, sautait de joie. Il était sur un nuage, radieux, mais moi, j'étais serein", assure le deuxième meilleur buteur de la compétition aztèque.
La campagne espagnole prend fin en quart de finale contre la Belgique, depuis le point de penalty.
À Italie 1990, l'expérience est plus douloureuse puisque l'aventure s'achève dès les huitièmes contre la Yougoslavie. "Je n'étais pas en forme. J'aurais aimé être beaucoup plus utile à mon équipe. J'ai même touché un poteau sur un coup de tête…", regrette-t-il encore.
La sérénité aura été l'une des marques de fabrique de cet attaquant qui, au cours de ses plus de 12 ans passés dans l'élite, a reçu moins de cinq avertissements et n'a jamais été exclu. "Je pense vraiment qu'un joueur a l'obligation d'être toujours à l'affût de ce qu'il peut faire pour aider son équipe. Ce n'est pas en me disputant avec l'adversaire ou avec l'arbitre que j'allais y arriver. Sur le terrain, ma mission consistait à battre l'adversaire en faisant preuve d'intelligence." Et Dieu sait qu'il en avait à revendre…
Pour en arriver là...
Lui qui a toujours su faire preuve de diplomatie sur le terrain fait aujourd'hui apprécier cette qualité dans les coulisses et dans son travail de représentation du club de son cœur. Dans les tribunes, il souffre et exulte avec son équipe. Il a également effectué quelques incursions dans le monde du journalisme, en tant que consultant sur les rencontres internationales. Chacune de ses analyses était marquée du sceau de l'élégance et du sang froid.
Butragueño semble posséder les atouts nécessaires pour faire carrière dans le métier d'entraîneur, mais il n'a jamais envisagé une telle voie. "Jamais. Je reconnais que c'est une profession fascinante, mais elle est cruelle. C'est un défi quotidien, qui va jusqu'à des extrémités rarement exigées dans d'autres professions. Je respecte beaucoup ce métier, de plus en plus même, car je mesure la difficulté de la tâche."
IN.FIFA.com
Publié dans :
Butragueño