Auteur :
O.R.B.A.
mardi 10 mars 2020 14:22
Après son brillant passage au WAT, Seydina Issa Aidara, qui a fait partie de la génération en or du club phare de la ville des Zianides, est en train de réussir des débuts très prometteurs comme entraineur. Sacré champion avec les U20 du Sénégal, il nous a confié son sentiment après cette belle aventure, tout en nous donnant son avis sur plusieurs sujets liés au football africain…
Tout d’abord, félicitations pour votre sacre à la tête du Sénégal en Coupe Arabe des U20…
Merci beaucoup pour vos félicitations mon frère. C’est très gentil de votre part.
C’est particulier de remporter le trophée en tant qu’invité, n’est-ce pas ?
C’est sûr que c’est particulier, car le Sénégal ne fait pas partie de l’Union Arabe. Néanmoins, il ne faut pas oublier que nous sommes un pays avec pas moins de 95% de musulmans. Nous étions invités pour ce tournoi, et je pense que nous avons admirablement représenté le football sénégalais en remportant le titre au final.
Quelle est la différence entre le football africain et arabe ?
C’est surtout au niveau mental et athlétique. Le football arabe ou celui du Nord Afrique, est assez technique et tactique et très rusé. Cependant, l’Africain est plus fort physiquement. Actuellement, les joueurs arabes travaillent plus le domaine athlétique, pour répondre au défi physique.
Avez-vous suivi le parcours de la sélection algérienne durant ce tournoi ?
J’ai bien suivi les prestations des Algériens, et je ne vous cache pas que j’étais surpris après leur élimination. C’est une équipe totalement différente à celle que nous avons affrontée à deux reprises en amical à Alger. Même si je n’ai pas suivi tous les matchs en direct, j’ai tout visionné par la suite, et je peux vous assurer que c’est une belle équipe, qui joue bien au ballon, mais elle a été malheureusement éliminée, ce qui a d’ailleurs surpris les observateurs sur place.
Que pensez-vous de la décision de certains anciens grands joueurs africains d’ouvrir des académies de football en Afrique ?
C’est une bonne chose, car cela ne va que développer le football en Afrique. Aujourd’hui, tous les grands clubs européens ont leur propre centre de formation, en misant beaucoup sur les joueurs formés chez eux. Si on a beaucoup d’académies en Afrique, cela va aider les jeunes à réaliser leurs rêves, vu que le football est devenu un grand business. Certes, tout le monde ne peut pas devenir professionnel, mais ils auront au moins la possibilité de vivre et croire à leurs rêves, en titillant le haut niveau.
Pensez-vous que les sélections africaines doivent former leurs propres joueurs ou chiper des éléments façonnés en Europe ?
C’est une situation assez délicate, car dans les sélections africaines, ce sont généralement les binationaux qui sollicitent leur pays d’origine. Ce n’est pas une mauvaise chose, car ils apportent forcément un vrai plus. Mais nous devons continuer à former nos jeunes joueurs, car si demain il y aura une défaillance dans ces binationaux, on pourra s’appuyer d’ores et déjà sur nos propres jeunes formés en Afrique.
Les actuels tauliers des Lions de la Teranga ou des Fennecs n’ont pas été formés dans des clubs africains…
C’est une réalité aujourd’hui, vu que plusieurs sélections africaines misent sur des éléments nés et formés en Europe. Certains ne connaissent même pas l’Afrique, et lorsqu’ils viennent en sélection, ils ont du mal à s’adapter au sol africain.
Est-ce que les pays africains ont besoin de solliciter des formateurs ou des sélectionneurs européens ?
Les Africains doivent compter sur eux-mêmes, car ces entraineurs ou formateurs européens qui débarquent en Afrique ne peuvent rien apporter chez eux, sinon, ils ne viendraient jamais chez nous. Si dans les Fédérations africaines ils faisaient confiance à leurs propres fils, en leur donnant les mêmes moyens mais aussi le temps donné aux Européens pour accomplir correctement leur mission, ils auraient forcément de meilleurs résultats.
La présence de Belmadi et Aliou Cissé en finale de la récente CAN est le meilleur exemple à suivre, non ?
Absolument, car l’un a permis à son pays de remporter le trophée, et l’autre d’atteindre la finale. Pour moi, c’est l’exemple parfait à suivre. Des sélectionneurs européens étaient présents à la CAN, mais ce sont finalement deux entraineurs locaux qui ont animé la finale.
Que pensez-vous du racisme qui est de retour ces derniers temps dans le milieu du foot ?
Le racisme est une chose déplorable. Nous sommes au 21e siècle, et aujourd’hui on ne devait pas parler de ces choses-là. Mais partout dans le monde, tu va trouver des brebis galeuses qui vont semer la pagaille. Maintenant, il faudra prendre des mesures nettement plus drastiques et draconiennes pour essayer d’enrayer cela. Il faut identifier les fauteurs de trouble et les sanctionner lourdement, sinon, cela va continuer.
Est-ce que le fait de quitter le terrain est la meilleure des réponses aux cris racistes, selon vous ?
Cela peut être une solution, mais à condition d’être suivi par tous ses coéquipiers, en arrêtant totalement le match. Si seulement le joueur visé sort et le match continue, cela ne réglera rien du tout. Il faut un accompagnement et que toute l’équipe sorte, pour marquer le coup. Les gens font des efforts pour combattre le racisme mais ce n’est pas encore suffisant.
Si Sadio Mané n’était pas sénégalais, aurait-il plus de chances de remporter le Ballon d’Or ?
Je ne veux pas rentrer dans le débat entre Sadio Mané noir ou blanc, mais je suis sûr et certain qu’il mérite amplement de gagner le Ballon d’Or. Je ne peux pas dire que Messi ne méritait pas de le gagner, mais Sadio doit travailler encore et toujours, et son jour viendra. Moi, c’est surtout son classement qui me gêne, car il pouvait être facilement deuxième. Maintenant, je reste persuadé qu’il va remporter le Ballon d’Or s’il continue d’afficher le même visage qu’aujourd’hui.
Selon vous, qui est le meilleur joueur africain à l’heure actuelle, Sadio Mané, Mahrez, Aubameyang ou Mohammed Salah ?
Aujourd’hui, les deux tops meilleurs joueurs sont Sadio Mané et Riyad Mahrez. Ce sont les deux joueurs africains qui me font la plus forte impression. Sur l’année civile, ils ont vraiment marqué le coup. Chacun a fait de très belles performances que ce soit en club ou en sélection. Ce n’est pas parce que je suis Sénégalais que je vais choisir Mané, mais ce sont deux très grands joueurs.
Pensez-vous que votre compatriote Koulibaly serait le plus cher transfert dans l’histoire pour un défenseur en cas d’un départ de Naples cet été ?
Koulibaly est une valeur sûre dans le marché des transferts. Il est logiquement sollicité par de très grands clubs, à l’instar de Manchester City, le Barça, le PSG Tottenham, ou Manchester United. C’est des grands clubs qui ont de gros moyens financiers, qui peuvent mettre beaucoup de millions d’euros sur lui. Si demain Koulibaly coutait 200 millions d’euros, cela ne serait pas une surprise pour moi. C’est un joueur de classe mondiale qui peut jouer dans n’importe quel club dans le monde, et cela ne m’étonnerait pas de devenir cet été le plus cher défenseur de l’histoire du football.
Après la Coupe Arabe, peut-on connaitre vos ambitions pour le futur ?
On vient tout juste de finir la Coupe Arabe, et je suis toujours le sélectionneur adjoint de la sélection U20. J’ai des ambitions personnelles, en attendant ce que peut nous réserve l’avenir.
Etes-vous tenté par une pige en Algérie, et notamment à la tête du WAT, votre ancien club ?
Il ne faut pas oublier que j’ai le WAT dans le cœur et le sang. Je suis un entraineur professionnel, et si demain le WAT juge qu’il a besoin de mes services, je serai présent avec plaisir. Je ne ferme aucune porte et encore moins celle du WAT.
Publié dans :
salah
Koulibaly
Mané et Mahrez
Belmadi et Aliou Cissé