Il s’exprime pour la première fois pour une télévision algérienne, Adam Ounas a choisi El Heddaf TV pour revenir en exclusivité sur sa nouvelle vie à Naples, son choix pour l’Algérie et ses ambitions avec le leader de la Serie A. Adam, très serein, nous raconte sa progression en Italie sous la coupe d’un coach d’envergure internationale, en l’occurrence Maurizio Sarri. Entretien !
Tout d’abord, comment avez-vous vécu ce retour à la compétition avec Naples ?
D’abord concernant le match de l‘Udinese, c’était réussi, je dirais sur les plans personnel et collectif car nous avons pu arracher la qualification chez nous. Après, je pense que c’était dur notamment pour certains joueurs comme moi parce que cela faisait longtemps qu’on n’avait pas joué autant de minutes. Le coach a jugé que j’avais répondu présent, maintenant il va falloir bosser dur pour grappiller encore des minutes de temps de jeu pour espérer avoir du rythme lors des prochaines rencontres.
Votre situation n’est pas si reluisante que ça, êtes-vous satisfait de vos débuts avec Naples ?
Bien sûr, je dirais que c’est un bon début, surtout que le directeur technique m’avait avisé. Il m’a dit que dans un premier temps j’allais faire de petites apparitions et je pense que les choses avancent bien puisque j’ai déjà deux titularisations avec Naples et plusieurs apparitions. Après, je m’y attendais un peu car on ne m’a pas dit que je n’allais pas être titulaire tout de suite. Maintenant, à moi de travailler tous les jours à fond à l’entraînement pour essayer de gagner en temps de jeu.
Vous avez quitté les Girondins très jeune, parlez-nous de votre intégration dans ce grand club de dimension internationale…
A vrai dire, lorsqu’on arrive comme ça dans une grosse équipe comme Naples, on a besoin de prendre ses repères et, franchement, la présence de Faouzi Ghoulam et Khalidou Koulibaly, que je considère comme deux grands frères, m’a beaucoup aidé à m’adapter. Après, c’est vrai qu’au début c’était compliqué avec le problème de langue et tout ça, j’avais un peu de mal à m’intégrer, mais Hamdoulillah aujourd’hui je m’en sors assez bien, j’espère que ça va continuer comme ça.
A votre arrivée, vous étiez un peu retiré, on voyait cela à l’entraînement, mais sur le terrain vous n’étiez pas timide, on vous a vu briller dès les premiers matchs amicaux avec Naples en période d’intersaison…
Il est vrai que lorsque je suis arrivé, je ne connaissais personne ici, donc j’étais un peu dans mon coin, mais après j’ai eu la chance de trouver des joueurs qui parlaient français comme Mertens, Koulibaly et Faouzi, qui était toujours là pour me conseiller et je tiens à les remercier.
Le coach Sarri ne tarit pas d’éloges sur vous, mais vous jouez peu, cela ne passe pas inaperçu puisque la presse italienne évoque toujours votre cas, mais vous donnez toujours raison au coach…
Moi je ne m’impatiente pas du tout. J’ai 21 ans, et je suis conscient de ma marge de progression. Je dois améliorer certaines qualités sur le plan tactique et notamment dans le domaine défensif. Comme le coach me l’a toujours dit, le talent, soit on l’a, soit on ne l’a pas, donc ce qui me manque c’est de bien travailler pour apprendre vite, et avec Sarri on apprend beaucoup de choses, croyez-moi.
Vous n’avez jamais évoqué cela dans la presse algérienne, pouvez-vous si vous voulez bien revenir sur le choix de l’Algérie alors qu’on vous présentait comme une pépite en équipe de France jeunes ?
(Rires.) C’est vrai, je n’aime trop m’y étaler, mais je vais quand même vous répondre. Vous savez, quand on vous avez des parents nés en Algérie et que vous êtes né en France, le choix est souvent compliqué pour certains, pour plusieurs raisons, mais moi, mon choix était déjà fait. Depuis le début, c'est-à-dire même lorsque je faisais mes classes en équipe de France jeunes, j’avais toujours l’idée de jouer pour l’Algérie. Lorsque j’avais commencé à jouer en Ligue 1, je n’ai jamais changé d’avis ni d’idée, c’était l’Algérie. C’est le choix du cœur, c’est comme ça, on ne peut pas trop y penser.
Parlez-nous un peu de vos visites au pays de vos parents, lorsque vous étiez jeune…
Je venais souvent. Depuis que tout petit, je venais pratiquement au moins tous les deux ans. Mais après lorsque je suis passé professionnel, c’est devenu un peu compliqué. Ces quatre dernières années, je n’ai pas trop eu le temps d’y aller, avec la préparation et tout, on est vraiment pris par le temps.
La dernière fois que vous êtes déplacé en Algérie, c’était quand ?
C’était lors du rassemblement de l’Equipe nationale avant le match de la Zambie. J’ai pris le temps de visiter mon patelin, et j’espère y revenir plus souvent Inch’Allah, et pourquoi pas, l’été prochain, pour des vacances.
Vous êtes de quelle ville en Algérie ?
Je suis de Mostaganem, c’est la ville d’origine de mes parents. Je salue tous les gens de Mostaganem en cette occasion et tout le peuple algérien.
Naples, ça ressemble à Mostaganem ?
(Il rit franchement.) Oui, un peu c’est la même mer… Après, j’aime beaucoup les plages algériennes, surtout celles de Mostaganem et Oran que j’ai eu le plaisir de visiter.
Madjer nommé sélectionneur, un petit mot par rapport à cette désignation ?
Ecoutez, c’est le président qui fait ses choix, et nous sommes tenus de les respecter, après, nous les joueurs on est là pour répondre présent et apporter ce qu’on sait faire à la sélection et remporter des titres Inch’Allah. Quand j’étais petit, mon père me parlait souvent de Madjer et sa fameuse talonnade. Il me parlait aussi de Belloumi qu’il présentait comme un grand joueur.
On est éliminés de la Coupe du monde 2018, êtes vous frustré de rater cet événement ?
Oui, c’est sûr, comme tout le peuple et comme tous les joueurs, après c’est difficile aussi d‘aller à la Coupe du monde tous les quatre ans, je pense qu’on avait l’effectif pour réussir cet objectif, malheureusement, cette fois, ça ne s’est pas fait. Ce n’est pas grave, on essayera de se racheter la prochaine fois et jouer à fond la CAN 2019.
Qu’avez-vous à dire à ce peuple algérien, triste de voir son équipe nationale éliminée de la Coupe du monde 2018, vous comprenez son désarroi ?
Bien sûr que je ressens la même chose que les supporteurs, et tous les joueurs je pense. Même je suis passé par là. Quand j’étais petit, j’étais le premier supporteur de l’Equipe nationale. J’avais vécu la Coupe du monde 2014 dans la peau d’un fan de l’EN, après il faut se dire que c’est plus difficile pour nous les joueurs de rater un tel événement. Eux, ils regardent les matchs, nous on les vit, on est dedans, ça nous fait mal de perdre sur le terrain. C’est plus compliqué d’être sur le terrain que dans les tribunes.
Comment avez-vous vécu votre dernière sortie en sélection contre la Zambie ?
Franchement, le public était parfait, il y avait une bonne ambiance, le stade était rempli malheureusement on a perdu. Je pense qu’ils étaient tristes. C’est normal, même moi quand j’étais petit, j’avais des équipes que j’aimais voir gagner et lorsqu’elles perdaient j’étais dégouté pour eux, après voilà il faut comprendre.
Vous dites que vous êtes le supporteur numéro de l’Equipe nationale, êtes-vous sorti défiler en France malgré l’élimination de l’Algérie contre l’Allemagne en 2014 ?
J’ai suivi ce match avec plusieurs amis chez moi à Tours. L’Equipe nationale avait sorti un grand match et je me rappelle qu’on y avait tous cru, je pense sincèrement qu’il y avait de la place pour battre les Champions du monde. On aurait pu passer franchement ! Mais après, je ne suis pas sorti. En tout cas, ceux qui l’ont fait ont eu raison, ça méritait bien.
Et contre la Russie ?
C’était la délivrance, un moment inoubliable vécu aussi en famille. C’était la première fois qu’on se qualifie au second tour et je ne vous cache pas que c’était une fierté énorme pour nous les Algériens.
Pour vous, le match référence c’était l’Allemagne ou la Russie ?
Pour moi sincèrement c’était l’Allemagne, malgré la défaite !
Pourquoi ?
Parce que l’Allemagne est plus forte que la Russie et les Champions du monde ont eu beaucoup de mal à jouer contre l’Algérie. On les a tenus en respect, comme on dit. C’est la prestation que tout le monde retient de la sélection dans ce Mondial 2014.
Les Taider, Ghoulam, Feghouli et les autres voulaient affronter la France en quarts de finale, c’était peut-être une motivation ?
Possible, mais je crois que les joueurs avaient plus hâte de gagner ce match contre l’Allemagne quel que soit le futur adversaire parce qu’en tant que professionnel on pense toujours au match qu’on joue sans trop penser au prochain.
En Algérie, on pense tous que vous êtes un joueur sélectionnable vu votre talent et vous commencez à faire parler de vous sur les plateaux de télévision, une réaction ?
C’est bien d’entendre ce qu’on dit de moi. Ça m’encourage, mais c’est à moi de prouver sur le terrain. C’est bien ce qu’on dit de moi, mais je respecte les choix du coach. Je dois travailler pour plus tard et avoir ma place à l’avenir.
Et si on parlait un peu de votre ami Faouzi Ghoulam, vous arrivez tous les deux de la Ligue 1, sa progression vous surprend-elle ?
J’ai toujours suivi les matchs de Ligue 1 avec mon père. Déjà en France, Ghoulam était pas mal, et quand je suis arrivé en Italie j’ai découvert un grand joueur. Franchement, Faouzi est un joueur top.
Faire partie du même effectif que Mertens, Insigne, Ghoulam, Koulibaly et Hamsik vous fait quoi ?
Lorsque j’étais petit je regardais leurs matchs et j’étais un admirateur de ces grands joueurs que vous venez de citer, alors imaginez un peu maintenant que je suis devenu leur coéquipier à Naples ! Parfois j’étais perdu, je me disais : c’est vrai ce que je suis en train de vivre ou c’est un rêve ? Après c’est sûr lorsque tu arrives dans un vestiaire où tu trouves des joueurs de classe mondiale, tu es un peu perdu. Je me demandais vraiment si c’était la réalité, après, côtoyer des joueurs de classe mondiale, ça te fait progresser et ça aide à arriver là où on veut aller.
La réussite de Mahrez en Angleterre vous inspire-t-elle ?
Oui, Mahrez vient de très loin. Quand je jouais à Tours alors que j’étais jeune, je le regardais jouer au Havre. Je m’y rendais souvent avec mon oncle. En parlant de Mahrez, mon oncle me disait : «Lui, il va aller très loin», et l’avenir lui a donné raison. Franchement, Riyad est la fierté de tous les Algériens. Même lui il doit être très fier d’être arrivé là où il est après être parti de si loin. J’espère que ça va continuer pour lui.
Pour vous aussi, à Naples, le coach Sarri, Hamsik, Mertens et Koulibaly sont unanimes, vous êtes un génie, qu’est-ce que ça vous fait ?
Déjà, je les remercie parce qu’il s’agit de très grands joueurs de football et d’un entraineur d’envergure mondiale. Après, quand tu joues dans une équipe où il y a plusieurs joueurs de top mondial, je crois que c’est plus facile de progresser avec eux et apprendre plus vite. Moi je suis toujours à leur écoute.
Qu’est-ce que qu’on vous conseille ?
On me demande toujours de travailler fort à l’entraînement. On me conseille d’être patient, attendre ma chance et surtout bien la saison lorsque le coach m’accorde sa chance afin de bien me montrer sur le terrain.
En France, on se demandait beaucoup si c’était vraiment le moment pour vous de partir en Italie, cela a-t-il pesé dans votre tête ?
Non, franchement, je n’écoute pas trop ce qui se dit dans la presse, moi je concerte ma famille et on a vu que Naples était un bon choix de carrière, le reste… lorsque j’avais signé on m’a bien expliqué que la première année était pour l’apprentissage. Moi j’ai écouté, et je suis venu avec mon père, j’ai signé et puis voilà !
Sortir du ghetto comme on dit n’est pas facile pour un jeune Franco-Algérien, quels conseils donnez-vous aux jeunes de quartier pour faire carrière comme Mahrez, Feghouli, Boudebouz, Ghoulam ou vous-mêmes ?
C’est clair que c’est une lutte quotidienne. Je leur dis de ne rien lâcher. Il faut se battre tous les jours. Je me rappelle quand j’étais petit lorsqu’il faisait froid je disais à mon père je ne vais pas au foot ! Après, j’ai compris lorsque je suis devenu professionnel que quelles que soient les conditions climatiques tu dois t’adapter et aller au travail. Qu’il neige, qu’il fasse froid ou qu’il fasse trop chaud, il faut travailler et répondre présent à l’entraînement quotidiennement. Moi j’ai suivi les conseils de mon père et Hamdoulillah je suis arrivé là où je suis maintenant. Il y a aussi mon agent avec qui je travaille depuis longtemps et je suis toujours avec lui, tout se passe bien, Hamdoulillah.
Parlez-nous de votre progression chez les Girondins…
Je suis arrivé à 16 ans et demi. Tous les coachs que j’ai eus m’ont aidé à progresser et pousser à atteindre le niveau professionnel. C’est Willy Sagnol qui m’a lancé dans le groupe professionnel ensuite j’ai poursuivi ma progression avec une première apparition réussie et un but marqué dès mon premier match.
On dit que Sagnol était sévère un peu avec vous, qu’en est-il ?
C’est normal ! J’étais jeune il fallait bien qu’il me secoue un peu. Quand j’étais jeune, il y a des choses que je voulais trop bien faire, alors il était toujours là pour me conseiller, pour éviter que je fasse les choses mal. Après, il me donnait beaucoup de confiance, c’est pour cela que je suis arrivé à réussir ma première saison en Ligue 1.
Pouvez-vous nous citer d’autres entraineurs qui ont compté dans votre carrière ?
Oui bien sûr il y a eu aussi Patrick Battiston, que j’ai eu en CFA avec la réserve, Marius Trésor et Philippe Lucas, que j’ai connus en jeunes. Ils m’ont beaucoup conseillé et facilité ma progression.
Vous jouez dans le club où un certain Diego Maradona est passé, c’est quand même pas mal dans une carrière…
Oui, c’est normal, je veux bien le rencontrer d’ailleurs (il rit franchement).
On vous dit quoi à son sujet ?
On me dit souvent que c’était un truc de fou ! Moi je ne l’ai pas vu jouer car je n’étais pas encore né lorsqu’il était footballeur. J’ai regardé plusieurs vidéos de lui et, sincèrement, il ne faut pas se mentir, c’était un génie !
Pour revenir à la sélection, vous allez jouer des équipes mondialistes, le Portugal, l’Iran et d’autres sélections, vous croyez que c’est une bonne chose pour préparer la Gambie ?
La difficulté en Afrique c’est les conditions de jeu ainsi que la nature des adversaires. En Europe, les terrains sont plus adaptés au football et les équipes sont moins physiques qu’en Afrique. Après, c’est toujours bien de se frotter aux grandes nations européennes et mondiales. Ça nous permet de nous situer un petit peu et progresser.
Racontez-nous un peu vos débuts en Ligue des Champions…
Lors du premier match contre Feyenoord, j’étais en tribune. Ensuite j’étais sur le banc contre Manchester City en déplacement. Franchement, entendre l’hymne de la Ligue des champions me donnait des frissons. Après, j’ai fait quelques apparitions, dont celle contre Manchester City. J’ai essayé d’apporter ce que le coach me demandait de faire. Sarri me fait confiance, il me fait jouer, et moi, pour ma part, j’essaye de lui rendre la monnaie en essayant de faire des passes décisives ou marquer des buts.
Certains avancent que vous devriez aller en prêt, cet hiver, qu’en est-il au juste ?
Ecoutez, je ne me prends pas la tête, je suis bien à Naples, Sarri me fait confiance et tant que personne n’est venu me dire que tu seras prêté cet hiver, je suis toujours à Naples. Je suis ici pour apprendre et grappiller des minutes de temps de jeu pour peaufiner ma progression avec Sarri.
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Ounas