Sacré champion d’Afrique avec l’équipe nationale le 19 juillet dernier et meilleur joueur de la phase finale de la CAN, Ismael Bennacer s’engage avec le plus prestigieux club italien, le Milan AC. A 22 ans, le joueur sera sous la loupe à San Siro pour cette nouvelle saison. Dans une rencontre avec Le Buteur au centre sportif du club, le milanello, le milieu de terrain algérien a répondu à toutes les questions. Il évoque son arrivée au Milan AC, les tractations avec le club lombard et surtout la phase finale de la CAN remporté avec les Verts. Sans plus tarder, on vous laisse le soin de découvrir cette belle interview.
Alors Ismael, vous signez au Milan AC, vos premières impressions ?
Salam alaykoum, je suis très heureux, fier et surtout honoré d’être dans cette grande entreprise, de jouer dans ce grand club. C’est une immense fierté de pouvoir défendre les couleurs rouge et noir de ce prestigieux club.
Le Milan AC, un rêve pour vous ?
Oui, bien sûr. Le Milan AC est un club qui fait rêver tout footballeur pas uniquement moi. Beaucoup de joueurs, si ce n’est pas la totalité des footballeurs rêvent de jouer dans ce prestigieux club. Aujourd’hui, je ne suis qu’à mes débuts avec le club et j’ai vraiment compris ce que veut dire le Milan AC. C’est tout simplement un club pas comme les autres et un grand club, moi qui vient d’Empoli.
De l’Empoli vers le Milan AC, du chemin parcouru…
Effectivement, je suis venu d’un club comme Empoli vers un club prestigieux qui est le Milan AC. C’est vraiment phénoménal.
Jouer dans ce grand club est une pression ?
Non, ce n’est pas une pression. La vie d’un footballeur est faite ainsi. Il y a le travail qui compte. Dans la vie, c’est toujours comme ça. A moi de montrer mes qualités. Je ne vous cache pas qu’après ma signature, j’ai réellement découvert c’est quoi le Milan AC. J’ai découvert que c’est un club mythique et à part. Aujourd’hui, je me dis que je suis chanceux d’être dans ce grand club.
Racontez-nous vos débuts chez les Rossoneries ?
C’était un sentiment spécial et à part. Je suis arrivé au centre d’entraînement le Milanello. J’ai rencontré les joueurs et j’ai discuté avec eux. Ils m’ont bien accueilli. Même chose avec le coach (ndlr : Marco Giampaolo). J’ai aussi discuté avec lui et avec les responsables du club. C’est un moment important dans ma carrière. J’ai été mis très à l’aise et j’ai vite commencé le travail. Dans ce centre, il y a tous les moyens et les commodités. Je pense que toutes les conditions sont réunies pour réussir et c’est ce que je veux.
Vous êtes au Milan AC, on vous a sans aucun doute parlé du fameux derby de la Madonnina face à l’Inter de Milan…
Non, sincèrement, personne ne m’a parlé de ce match. C’est vrai que ça reste un derby avec un cachet particulier mais je pense que tous les matchs se ressemblent et ont la même importance.
Mais vous savez quand même que la défaite est interdite lors de ce match…
Oui, on fera le maximum pour gagner cette rencontre afin de faire plaisir aux responsables du club et aussi aux supporters. On fera aussi le nécessaire pour remporter les autres matchs car ils sont aussi importants. Au bout de chaque match, il y a trois points en jeu.
C’est vrai que les matchs se ressemblent et au bout de chaque match, il y a trois points. Mais ce derby est un peu particulier avec l’ambiance de folie qui régnera à San Siro et la grosse rivalité entre les deux clubs. Attendez-vous ce match avec impatience ?
C’est vrai que j’attends cette rencontre face à l’Inter de Milan avec grande impatience car c’est un match où il y a toujours eu une ambiance de folie à San Siro. Mais je pense qu’il ne faut pas aller trop vite. Il faudra penser aux premiers matchs et récolter un maximum de points. Après, le derby c’est un match particulier où il faudra avoir la même volonté, celle de remporter la rencontre. L’ambiance ce jour-là sera merveilleuse. C’est un derby qui est très suivi à travers le monde.
Vos proches et votre entourage vous ont conseillé d’aller au Milan AC ?
Oui, mes proches et mon entourage m’ont tous conseillé d’aller au Milan AC car il s’agit d’un grand club qui ne se refuse pas. Moi, je consulte beaucoup mes proches et notamment ma famille et mes parents, mais à chaque fois, c’est moi qui prends la dernière décision. Cette fois-ci, tout le monde était d’accord avec moi pour jouer au Milan AC. J’ai pris cette décision par conviction car c’est un grand club qui va me permettre de progresser encore et de vivre de nouvelles sensations.
Comment se sont déroulés les contacts avec le Milan AC et quelle était votre réaction ?
Les contacts ont commencé avec le Milan avant la fin de saison, puis ils sont devenus plus sérieux peu avant la 32e édition de la phase finale de la coupe d’Afrique des nations qui s’est déroulée en Egypte. Après la CAN, il n’y avait que quelques détails à régler avant de signer. Pour ce qui concerne ma réaction, il faut savoir que n’importe quel joueur qui apprend un tel intérêt ne doit qu’être content. J’étais heureux, content et surtout fier. Cela démontre que j’ai bien travaillé en club malgré la saison difficile à Empoli.
Que vous a dit le coach Marco Giampaolo ?
Tout d’abord, j’ai eu le coach Giampaolo avant et son discours a pesé sur ma décision de venir ici. Il faut dire que pour un joueur, il est très important d’avoir un coach qui te veut dans son équipe. Son discours m’a impressionné et motivé à rejoindre le club. Puis, on a aussi parlé du programme de travail car je devais avoir des vacances prolongées plus que les autres à cause de la phase finale de la CAN.
Vous arrivez au club avec un double statut ; champion d’Afrique et meilleur joueur de la CAN. Donc… on attend beaucoup de vous !
Oui, je suis entièrement d’accord avec vous. Les responsables du Milan AC et même le coach attendent beaucoup de choses de moi. Je suis conscient de la tâche qui m’attend. Je vais tout faire pour leur donner raison sur le choix et les convaincre aussi. Le Milan AC est un club qui me permettra de jouer le haut du tableau et peut-être la possibilité de gagner des titres. Donc, il y a beaucoup d’envie et de motivation pour réussir.
Savez-vous qu’en Algérie, beaucoup supportent le Milan AC ?
Je vais peut-être vous surprendre, mais sachez que je ne savais pas qu’en Algérie, il y avait beaucoup de gens qui aiment le Milan AC. Mais une fois que j’ai signé dans ce club, j’ai appris qu’ils aiment le club. Je les invite alors au stade de San Siro pour venir nous supporter (rire), comme ça le Milan AC aura beaucoup de supporters en plus.
Lorsque vous étiez jeune, vous suiviez le Milan AC ?
Oui, je suivais des matchs du Milan AC. Dommage que lorsque le club possédait une grande équipe, j’étais encore jeune. Mais je me souviens quand même de certains matchs et surtout du passage de Ronaldinho. C’était mon idole, un grand joueur. Il y a aussi Gennaro Gattuso que j’aimais beaucoup à cause de son excellent rendement lors des matchs.
Dommage pour vous, Gattuso a quitté le club…
Oui, c’est la vie et surtout c’est le football. Dans ce monde du football, il y a toujours des arrivées et des départs.
Paolo Maldini, capitaine historique du club, a rejoint la direction où il occupe un poste de responsabilité. Sa présence est motivante pour vous ?
Bien évidemment ! Paolo Maldini reste un joueur qui a marqué l’histoire du club, c’était un grand joueur durant son époque. Aujourd’hui, il a rejoint l’administration du club où il occupe un poste de responsabilité. C’est aussi la même chose pour Boban. Je pense que ce sont des joueurs qui nous motivent à travers leur présence pour donner encore plus. Moi personnellement, ça me motive de les voir au club.
Parlons maintenant de la sélection nationale. Si on revenait un peu en arrière. Trois mois avant le coup d’envoi de la CAN, avez-vous imaginé un seul instant que vous alliez être champion d’Afrique ?
Sincèrement, non. Je pense que personne n’a cru que l’EN allait être champion d’Afrique. Ce n’est que pendant le tournoi qu’on a cru en nos chances. Nul n’avait misé sur cette équipe. Dans le vif du sujet soit durant le tournoi, on a commencé à y croire. Sur le plan personnel, moi je ne jouais pas trop avant. Figurez-vous qu’en trois ans en sélection, je n’ai pas souvent joué. Je n’ai pas eu beaucoup de chance. Ce n’est que pendant la CAN que j’ai eu cette chance. Le sélectionneur national m’a fait confiance.
Et pourtant, le sélectionneur national, Djamel Belmadi, avait déclaré bien avant la phase finale de la CAN qu’il allait en Egypte pour remporter carrément le trophée. Un discours fou de sa part lorsqu’on sait la situation de l’équipe nationale durant les dernières années…
Je pense que c’était un discours logique. Lui c’est un entraîneur et il avait des objectifs. Il n’allait pas dire qu’on va faire juste de la figuration et un simple aller-retour entre Alger et Le Caire. Il y avait des objectifs que nous avons réalisés à la fin. Je suis content notamment pour notre peuple qui était heureux et fier de nous.
Après avoir battu le Kenya en ouverture, l’EN a battu le Sénégal. Est-ce que cette victoire vous a permis de grandir ? Ça a été le tournant ?
Je peux vous dire que le coach nous a un peu formatés. On est allés pour gagner tous nos matchs. Après, cette victoire face au Sénégal lors du second match du tournoi nous a donné plus de confiance. On a affronté une excellente équipe du Sénégal qui était le favori de ce tournoi. Je pense que le sélectionneur national a réussi à faire un excellent même si le temps n’est pas suffisant.
Est-ce que vous vous êtes dit après ce match que l’équipe d’Algérie avait le profil de champion ?
Honnêtement, non ! On est resté humbles et sereins. On croyait en nos chances, on avait confiance en nous, mais on est restés sereins jusqu’au coup de sifflet final de cette finale face au Sénégal.
Au fil du temps, il y a eu l’élimination du pays hôte qui est l’Egypte puis le Maroc, un autre favori. Donc, la sortie de deux grands favoris vous a facilité la tâche, n’est-ce pas ?
Ecoutez ! C’est vrai que l’élimination de l’Egypte et le Maroc a été un grand coup, mais il faut savoir que nous avons battu de grandes nations de football, le Sénégal à deux reprises, le Nigeria et la Côte d’Ivoire. Pour nous, jouer face à l’Egypte ou le Maroc ou une autre équipe, c’est la même chose. On n’avait pas le choix. Pour finir champion, il fallait battre les grands du continent.
Beaucoup sont unanimes à dire que le match de la Côte d’Ivoire en quart de finale était le plus difficile. Vous partagez cet avis ?
Effectivement, c’était un match très difficile pour nous et même moi personnellement. On a joué ce jour-là à Suez où les conditions climatiques étaient très difficiles. Il faisait très chaud. Au départ, on a trouvé des difficultés à s’adapter et à trouver notre souffle, mais au fil du temps, on s’est adaptés. Oui, c’est vrai ! Le match face à la Côte d’Ivoire est le match le plus difficile de cette CAN. Il y avait beaucoup d’émotion lors du match et surtout vers la fin. On a affronté une grande équipe de la Côte d’Ivoire et pour être champion, on n’a pas le choix il faut battre ce genre d’équipe.
Qu’est-ce que vous retenez de ce match ?
C’est la qualification, tout simplement. Il faut dire la vérité, ce n’était pas notre meilleur match ce jour-là, par rapport à plusieurs paramètres. Mais au final, on était contents de cette qualification car on s’est qualifiés en demi-finale de la CAN.
On retient aussi cette communion entre joueurs et supporters à la fin…
Oui, il fallait cette communion. Il y avait beaucoup de supporters qui étaient venus d’Algérie pour nous encourager à partir de ce quart de finale. Ils nous ont soutenus tout au long de la partie et donc, en fin de match, nous avons fêté cette qualification avec eux.
Le pénalty raté par Boundjah a failli être fatal à l’EN…
Non, je ne pense pas comme ça. Il y avait ce pénalty sifflé par l’arbitre. Boundjah a pris ses responsabilités et a raté ce pénalty. Dommage pour lui car il aurait aimé le marquer. Après le football n’est pas une science exacte. Il aurait pu le marquer mais on perd à la fin. Donc, moi je ne retiens que cette qualification malgré le pénalty raté par Boundjah. L’essentiel reste la qualification.
La blessure de Youcef Atal vous a handicapés lors du match face aux Eléphants ?
Bien sûr que lorsqu’on perd un joueur clé comme Youcef Atal, c’est un véritable coup dur. Le pauvre s’est grièvement blessé pendant la première mi-temps. C’était un handicap sur le terrain car il reste une pièce maîtresse, mais je pense que Mehdi Zeffane qui avait pris sa place, s’était bien débrouillé sur le terrain. Il a fait un match plein. Idem pour la demi-finale et la finale. Mehdi Zeffane a tenu son rôle comme il se doit et son apport a été vraiment précieux. Je tiens à le féliciter.
Durant la séance des tirs au but, qu’est-ce que vous vous êtes dit entre vous joueurs surtout qu’il y avait du manque d’expérience chez certains de nos joueurs ?
On s’est dit qu’il fallait se qualifier. Dans une série de tirs au but, il faut être concentré et bien gérer la pression. A mon avis, nous avons très bien géré cette pression et c’est ce qui nous a permis de se qualifier.
Avez-vous chambré votre nouveau coéquipier, Franck Kessie ?
Je vais vous raconter une anecdote. A la mi-temps de ce quart de finale entre l’Algérie et la Côte d’Ivoire, je l’ai croisé au tunnel menant vers le vestiaire. Il m’avait posé la question : « C’est vrai que tu vas venir au Milan AC ? ». Je lui ai alors répondu : « Oui, en principe ». Il m’a alors répliqué : « Allez viens, tu ne regretteras pas, on va bien s’amuser ».
Et ici à Milan lorsque vous vous êtes rencontrés ?
Ici à Milan, on n’a pas encore abordé ce match. On s’est vus mais on n’a pas évoqué ça. J’attends de bien le connaître pour le chambrer (rire).
Le Nigeria et le fabuleux but de Riyad Mahrez…
Le match du Nigeria reste aussi un match émotionnel. On a joué le Nigeria en demi-finale. C’est une des grandes équipes d’Afrique. Mahrez a marqué le but qualificatif lors du temps additionnel. Notre joie était immense, indescriptible. Par ce but, Riyad a confirmé son statut. C’est le capitaine et le leader de cette équipe. Il a prouvé que c’était lui qui tirait l’équipe vers l’avant. Ce match est serré et c’est Mahrez qui l’a débloqué.
Vous avez battu encore une fois le Sénégal en finale et avec une présence massive des supporters…
Oui, leur soutien était important pour nous afin de gagner cette CAN. Je pense qu’il n’y a qu’en Algérie où on peut vivre de tels moments. La présence de nos supporters a fait notre force durant cette CAN.
Durant cette finale, il y avait presque 30 000 algériens dans les gradins du Cairo Stadium…
On était contents et heureux de les voir avec un tel nombre important. Comme je vous ai dit, ça a fait notre force. Durant cette finale, on avait marqué le but tôt, mais grâce au soutien de nos supporters, on a pu tenir le coup.
Face au Sénégal, il y avait cet ascendant psychologique après les avoir battus en phase de poules ?
Non, ce n’était pas un ascendant psychologique. Pour nous, il fallait à tout prix gagner cette rencontre. Pour nous, une fois en finale, il fallait gagner coute que coute. Une finale se gagne, on avait cette volonté de remporter le trophée et répondre à la confiance des milliers de supporters qui étaient venus en Egypte pour nous encourager et ceux aussi qui étaient au pays. C’est vrai que nous avions battu les Sénégalais en phase de poules, mais les matchs diffèrent.
Vous avez travaillé avec Milovan Rajevac, Georges Lekeens, Lucas Alcaraz et Rabah Madjer. Qu’est-ce qu’a ramené de nouveau, Djamel Belmadi, à la sélection nationale ?
Oui, c’est vrai j’ai travaillé avec beaucoup d’entraîneurs, mais je pense que Belmadi a ramené à la sélection ce qu’il fallait. Franchement, chapeau bas pour lui, pour tout le travail qu’il a effectué et regardez ce qu’a montré la sélection en Egypte que ce soit sur le terrain ou même en dehors. Je suis vraiment un fan de Belmadi. Il a réussi beaucoup de choses.
Qu’est-ce que vous avez ressenti au retour à Alger avec cet accueil qui vous a été réservé par le peuple ?
Ça restera un des moments forts de ma carrière. C’était fabuleux. Il y avait du monde à notre accueil. Nous avons vécu des moments vraiment inoubliables à Alger. Nous les joueurs, on a senti cette joie du peuple et c’est le plus important. Nous allons tout faire pour se donner à fond lors des prochaines échéances afin de donner encore de la joie au peuple et de vivre de tels moments historiques.
Un message aux Algériens qui aiment le Milan AC…
Je leur dis que nous avons une bonne équipe et que nous allons tout faire pour réaliser une bonne saison.
Un tel club doit renouer avec la Ligue des champions…
Oui, mais il faut d’abord réaliser une bonne saison en Italie pour confirmer ensuite. On est confiants avant ce début de saison.
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